mardi 13 mars 2007

Soirée. 2/3

Acte second, le restaurant.
Il ne fait pas les choses à moitié ! Et je n’ai pas l’habitude des petits amis riches comme... de riches parisiens. Généralement, c’est Mac Do et autres fast-foods. Ne leurrons personne : l’argent, ça compte. Et ça rend très séduisant, parfois. C’est le cas pour lui. Heureusement que j’ai bien choisi ma tenue. Hélène m’a aidé. Ma robe noire, dos nu. Noir pour l’élégance, dos nu pour… Enfin, c’est assez explicite. Et mes jolies sandales à talon, les seules chaussures à talon sur lesquelles je tiens. Je les aime bien, parce qu’elles soulignent la finesse de mes chevilles. Et aussi parce qu’elles me grandissent, et j’en ai bien besoin. La tenue idéale pour ce genre de soirée. Un peu trop habillée pour aller au cinéma, mais tout à fait appropriée pour le dîner. A notre arrivée, le maître d’hôtel se précipite vers nous. M.***, votre table est prête. Mademoiselle, puis-je prendre votre manteau ? Nous nous retrouvons installés sur une petite table ronde. Tout ce chic n’est pas nouveau pour moi ; c’est l’aspect romantique, absent des dîners avec mon père, qui constitue la grande nouveauté. Nous dissertons sur la carte. Puis, une fois la commande prise, sur d’autres choses, banales. Je me sens audacieuse, sans doute aidée par le verre de blanc que j’ai descendu en un instant. Je déchausse discrètement ma sandale gauche et tends la jambe. Je touche sa jambe droite avec le bout de mon pied. Il arrête de parler une seconde, surpris. Il me sourit. Puis il reprend où il en était. Je prends ça pour un acquiescement silencieux. Que dit-il, je ne sais pas. Je suis bien trop concentrée. J’appuie plus fort et je monte. Heureusement que ces tables sont petites et que la nappe tombe jusqu’en bas. Une fois de plus, il arrête de parler. Il me sourit, puis, à mesure que je monte, son sourire s’efface. Il me lance maintenant un regard mi-amusé, mi-gêné. Il tourne la tête à droite et à gauche, pour s’assurer que personne ne remarque rien. Quand j’arrive à l’entre jambe et que je sens tout l’effet que j’ai produis, je me sens horriblement gênée et arrête aussitôt. Je remets rapidement ma sandale et me redresse sur la chaise. Nous échangeons un regard coupable et j’ai envie de lui sauter dessus. Le reste du repas est assez tendu. Nous avons encore toute la nuit, calme toi. Il paie, nous nous levons. Mademoiselle, votre manteau. Monsieur, à bientôt j’espère. Nous nous retrouvons seuls dehors. De nouveau, il m’embrasse. Il me pousse vers le mur, m’y appuie, et m’embrasse. Sur le front, sur la bouche, dans le cou. Ses mains se balladent. Les miennes aussi. Et j’ai un sursaut de conscience et de pudeur. Je le repousse doucement. Rien ne nous oblige à aller en boîte, nous pouvons rentrer tout de suite. Mais nous sommes censés retrouver certains de ses amis. Va pour la boîte. Nous avons toute la nuit. Nous avons tout le temps.

lundi 12 mars 2007

Soirée. 1/3

La soirée est censée se dérouler en trois actes. Nous allons d’abord au cinéma (j’ai choisi le film), puis au restaurant (c’est lui qui a choisi le resto) et enfin, un petit tour de piste dans un des club les plus selects.
Acte premier, le cinéma.
C’est le choix du film qui m’a le plus embarrassée. Je ne le connais pas encore très bien et j’ai peur de me tromper dans le choix. Quel genre choisir : romantique, au risque de passer pour une fille trop fleur bleue ou d’horreur, une bonne excuse pour me serrer contre lui; d’action, mais pas très propice au genre de chose que j’attends ; un film un peu intellectuel, mais j’ai peur de paraître prétentieuse (et je n’apprécie vraiment ce genre que seule). Finalement, je me suis décidée pour un habile compromis : une fresque historique qui promet de grandes scènes sentimentales (voire mieux), d’un grand réalisateur. Tout public.
Nous retrouvons devant le ciné. Dois-je l’embrasser pour lui dire bonjour ou quoi ? Il m’embrasse, gentiment, sur la bouche, sans insistance. Un point pour lui. Il est beau, bien habillé. Ca me change de tous les pouilleux que je fréquente généralement : de vraies chaussures en cuir, vernies, et pas d’horribles grosses baskets, un jean sombre et sobre, mais qui ne lui tombe pas sous les fesses (ça non, et qui laisse voir des formes plutôt appétissantes), une veste élégante qui s’ouvre sur une chemise (à manche courte, mais ça, je ne peux pas le deviner) de couleur pâle. On le voyant, je sens mon cœur qui palpite, et j’ai très envie de lui. Il est grand, large d’épaule, comme je les aime ; il est beau !
Le film se révèle assez mauvais. De mon avis ; mais face à son enthousiasme, je modère ma critique. Je ne suis pas bon public et je n’apprécie pas particulièrement la guimauve, et le film en dégoulinait. L’intérêt du film était ailleurs. Pendant les cinq minutes qui ont précédé les bandes-annonces et les dix minutes que celles-ci ont duré, nous discutons. Qu’as-tu fais cette semaine ? Le voyage n’était pas trop long ? « Small talk », comme disent nos amis anglophones. Puis les lumières s’éteignent pour de bon. Noir (total, ce serait exagérer). Le générique commence, il me prend la main. Je suis soulagée ; ce n’est pas si compliqué après tout, les relations. Je pose ma main sur sa cuisse, juste un peu avant l’entrejambe. C’en est presque excitant. Le film me fait oublier l’excitation ressentie à ce contact. Parfois, quand j’y repense, lorsque le film devient vraiment lourd, je caresse sa cuisse, légèrement. Et il me serre la main un peu plus fort. Pour dire quoi ? Arrête ou continue ? Dans le doute, abstiens-toi. J’arrête. Lorsque le générique de fin se met à défiler, il se tourne vers moi, me regarde (mon cœur accélère) et m’embrasse, plus longtemps cette fois. Avec la langue. Un frisson bien connu. Mais le lieu n’est pas particulièrement pratique. Et la soirée ne fait que commencer. Nous sortons et, tout en discutant du film, il me guide vers le restaurant de son choix. Nous avons toute la nuit. Nous avons tout le temps.

RUPTURE 2/4

MONOLOGUE

Le problème c'est le cul.

Je suis pour la sublimation : j'ai vu la Vierge dans un jet d'or (au mieux) et dans le bronze (au pire). J'ai accepté les cadeaux de l'orifice lacéré de George et exploré les côtés sombres de ma personnalité. J'ai connu l'intérieur d'un chien et les slings en cuir. Je n'ai plus peur des chaînes et des visages violets du vice. J'en ai fini avec les fièvres de l'enfant. En revenant chez moi, je n'ai pas su quoi dire : je ne parle pas de mes clients. Saint et sainte, j'ai retrouvé ma couronne.

Mais lequel d'entre eux à su mettre l'absence en laisse. Que faire lorsqu'il n'y a personne, que la voix ? J'ai voulu mourir « -dans le Temps » et je suis resté. Le manque devient frustration , je m'ébranle. La plaie suinte : ni la bonne et même pas assez.


DIALOGUE

-Aujourd'hui, j'ai connu l'Ennui.
-Je le connais tous les mardis.
-Entre rage et désespoir, j'ai voulu pleurer.
-Je dirais deux choses : 1) On se regroupe et on monte un syndicat. 2) Partons à la mer.
-Laquelle ?
-Les deux. Une dernière chose : on se fait une bolognaise pour accompagner les pâtes ?


FEUILLETON TÉLÉVISÉ

Intérieur #2 et intérieur #3 -Reprise au point où nous les avions quittés.
-Oui Bruno, j'ai pensé à ce que nous ferons quand nous nous retrouverons.
-Et que ferons-nous ?
-D'abord je t'embrasserai langoureusement, et je te dirai que je t'aime, que je le sais maintenant que je t'aurai retrouvé. Un long baiser de cinéma, un baiser d'amour, dans un coin, pour que personne ne nous voie. Puis nous irons à l'hôtel, parce que rentrer à la maison prendra trop de temps. Et nous commanderons les mets les plus exquis dans notre chambre. Et le soir nous irons crier nos retrouvailles au couchant.
-Je t'ai trompé…

Intérieur #1
Camilla est devant son ordinateur et sourit à l'écran en tapant frénétiquement. Elle est en peignoir. Elle rit à gorge déployée.
-Cela faisait longtemps que je n'avais pas autant ri. Basile tu es vraiment drôle !
Elle reprend sa tape frénétique.
-Je me demande quand je pourrai enfin le voir. Il m'a l'air si mystérieux. À quoi peut-il bien ressembler ? Rarement un homme m'aura autant intriguée.
Elle tape encore un peu
-La semaine prochaine ? Et bien c'est parti. Est-ce que j'ai quelque chose à me mettre ? Les soldes sont presque finies...


CONCLUSION

À ceux qui sublimeront la distance, je vais me coucher.
Deux nuits sans dormir c'est vraiment trop.

dimanche 11 mars 2007

RUPTURE 1/4

MONOLOGUE

J'aimerais pouvoir mentir plus longtemps, ce n'est plus possible. Un peu d'affection, tout ce que je voulais. Contact, chaleur humaine. De la bite.

Ce n'est pas suffisant. Je ne suis pas satisfaite. Insuffisant sous tous rapports. Ce que je veux c'est l'amour. Mais sans majuscule. Surtout pas avec une majuscule. Il y a une majuscule au Grand Amour ?

Ce n'est pas ma faute, j'ai essayé. Je devais le voir ce soir. Il ne viendra pas. Quelle excuse lui donner ? Pas besoin d'une bonne, un prétexte usé fera l'affaire.

J'essaie encore, même si un peu moins. Remarque que ce n'est pas sa faute non plus. Il s'est mis sur ma longueur d'onde et j'ai fait semblant que je me mettais sur la sienne. On devait aller faire du roller la semaine prochaine.
Est-ce vraiment impossible ? J'aimerais bien me forcer. Comme cela je le détesterai de plus en plus. J'en viendrai à le haïr et à souhaiter qu'il ne soit jamais venu en travers de mon chemin. Je le haïrai tellement que je pourrai lui faire les pires crasses. Son existence me sera tellement insupportable que j'en perdrai tout ce qu'il y a de bon en moi. Je serai méchante, la méchante. La salope dont les coups sont tellement bas qu'elle ne peut que le faire exprès. Celle qui n'a plus le bénéfice du doute pour elle. On la sait manipulatrice.

Bien sûr je feindrai l'ingénuité. Je ne le ferai pas exprès, de lui faire tant de mal. Appréhension et admiration dans le regard des autres : les féministes se rhabillent. Je serai cette femme forte et il se cachera sous son prépuce trop long.

Certains me diront hystérique.


DIALOGUE


-Je te dérange ?

-Non.
-Tu fais quoi ce soir ?
-Je ne sais pas encore.
-C'est-à-dire ?
-...
-Alors ?
-A priori rien...
-A priori ?
-Cela dépend de ce que tu propose.
-Tentée par une soirée télé ?
-Oui !


FEUILLETON TÉLÉVISÉ


Intérieur #1

-Tu m'as tellement manqué. Viens m'embrasser.
Elle s'avance vers lui d'un air distant. Elle l'embrasse du bout des lèvres, tout en prenant soin de toucher sa joue plus que sa bouche. Ses yeux regardent ailleurs.
-Que se passe-t-il, Camilla ? Il y a un problème.
Elle se retourne, ne pouvant supporter son regard ardent, dans lequel se lisent l'inquiétude, et la flamme du désir qui y brule encore. Elle se mord légèrement la lèvre, mais il ne peut le voir. Elle se retourne, face à lui, l'air décidée.
-Camilla ?

Intérieur #2 et intérieur #3
Chacun est au téléphone chez lui. L'un dans un bureau avec un téléphone filaire. L'autre se tient debout dans son salon, un sans fil à l'oreille.
-L'absence me pèse, Bruno.
-Ce n'est pas facile pour moi non plus.
Le premier se prend la tête entre les mains. Le second soupire.
-J'aimerais que tu ne sois pas si loin.
-Ne crois pas que ce soit facile pour moi.
-Téléphoner, c'est pire. Où va-t-on ?
Bruno s'assied dans son canapé, en laissant passer un instant.
-Tu as passé une bonne journée ?


CONCLUSION

-Je ne peux pas passer la soirée avec toi. Ni aucune autre d'ailleurs.


Et dire que demain je change de forfait de portable.